Ordonnances n° 2019-75, 2019-76 et 2019-78 du 6 février 2019 relatives aux mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne en matière de services financiers, relativement à l'entrée, au séjour, aux droits sociaux et à l'activité professionnelle et en matière de transport routier de personnes et de marchandises et de sûreté dans le tunnel sous la Manche
Prises sur le fondement de la loi n° 2019-30 du 19 janvier 2019 trois nouvelles ordonnances publiées au Journal officiel du 7 février 2019 ont pour objet de préparer le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne :
- Ordonnance n° 2019-75 du 6 février 2019 relative aux mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne en matière de services financiers. Elle comprend sept mesures qui entreront en vigueur en cas de sortie du Royaume-Uni sans accord et permettront d'assurer la continuité du financement de l'économie. Ces mesures viennent compléter des dispositions prises au niveau européen à l'initiative de la Commission européenne.
Une première mesure garantit la continuité de l'accès des entités françaises aux systèmes de règlement interbancaire et de règlement-livraison britanniques, qui jouent un rôle majeur pour garantir la stabilité et réduire le risque systémique des marchés financiers. À cet effet, l'ordonnance applique aux entités françaises participant à ces systèmes les dispositions de la directive « finalité » (directive 98/26/CE du 19 mai 1998), qui assure le caractère définitif des règlements qui sont effectués dans ces systèmes.
Une deuxième mesure clarifie les règles applicables aux contrats d'assurance valablement souscrits avant la sortie du Royaume-Uni auprès d'assureurs britanniques sur la base du passeport européen. Elle confirme l'obligation d'exécution de ces contrats par les assureurs, malgré la perte de la reconnaissance de leurs agréments en France (perte du « passeport »). Elle garantit ainsi le droit des assurés d'être indemnisés en cas de sinistres. Ces contrats ne pourront toutefois ni être reconduits ni donner lieu à l'émission de nouvelles primes, sous peine de nullité.
La troisième mesure a pour objet de clarifier les pouvoirs de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) vis-à-vis des entités britanniques ayant conclu des contrats sur la base du passeport européen.
Une quatrième mesure procède à deux adaptations permettant le fonctionnement du principal contrat cadre en matière de produits dérivés, le contrat cadre de l'association internationale des swaps et dérivés (ISDA), en droit français. Ces adaptations permettront aux acteurs d'adopter un contrat cadre ISDA de droit français offrant les mêmes caractéristiques que le contrat cadre de droit anglais.
Une cinquième mesure définit un mécanisme de substitution aux contrats cadre utilisés pour les services financiers. L'offre d'une nouvelle convention cadre sera réputée acceptée dès lors que le nouveau contrat cadre sera identique au contrat cadre initial, sous réserve de l'application du droit français et de la compétence de juridictions françaises.
Une sixième mesure introduit des règles assurant une transition facilitée en matière de gestion de placements collectifs devant respecter des ratios d'investissement dans des entités européennes. Les titres britanniques demeureront éligibles, pour une période délimitée, dans les organismes de placement collectifs distribués via les plans d'épargne en actions (PEA) et plans d'épargne en actions dédiés aux titres des PME et ETI (PEA PME), ainsi que pour les fonds de capital-investissement devant se contraindre à des ratios d'exposition à des entreprises européennes.
Une septième mesure désigne l'autorité des marchés financiers comme autorité compétente pour la supervision des activités liées à la titrisation, afin de permettre au marché de la titrisation de poursuivre son fonctionnement dans des conditions accrues de sécurité. (D'après le compte rendu du Conseil des ministres du 6 février 2019)
Voir aussi le rapport au président de la République sur l'ordonnance.
- Ordonnance n° 2019-76 du 6 février 2019 portant diverses mesures relatives à l'entrée, au séjour, aux droits sociaux et à l'activité professionnelle, applicables en cas d'absence d'accord sur le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne. L' ordonnance comporte les mesures législatives nécessaires pour régler la situation des personnes physiques et morales, en cas de retrait sans accord du Royaume-Uni de l'Union européenne, en matière de droit d'entrée et de séjour, de droits sociaux et de prestations sociales et de conditions d'exercice d'une activité professionnelle. Elle est prise sur le fondement des articles 1er et 2 de la loi du 19 janvier 2019 habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.
En matière de droit d'entrée et de séjour, l'ordonnance aménage un régime spécifique à l'égard des ressortissants britanniques qui résidaient déjà régulièrement en France à la date du retrait du Royaume-Uni. Elle prévoit ainsi une période d'une durée maximale d'un an pour permettre à ces ressortissants britanniques d'obtenir un titre de séjour et instaure des conditions d'accès dérogatoires à ces titres.
En matière de droits sociaux et de prestations sociales, l'ordonnance permet le maintien pour une durée d'un an de l'éligibilité des ressortissants britanniques bénéficiaires du revenu de solidarité active résidant en France à la date de retrait du Royaume-Uni. Elle assure la continuité de la prise en charge des soins de santé dans les conditions actuelles qui découlent du droit de l'Union européenne pendant une période de deux ans. Les conditions de prise en compte en France des périodes d'assurance ou d'emploi accomplies au Royaume-Uni sont également déterminées par l'ordonnance.
Enfin, plusieurs mesures sont relatives à l'exercice d'une activité professionnelle en France dont les conditions se trouveraient affectées par une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne sans accord.
Un décret pourra suspendre les mesures dérogatoires relatives au droit de séjour, au revenu de solidarité active et à la prise en charge des soins de santé, si le Gouvernement constate que le Royaume-Uni n'accorde pas aux ressortissants français présents sur son sol un traitement équivalent à celui prévu par cette ordonnance ou par l'ordonnance relative à la préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne en matière de transport routier de personnes et de marchandises et de sûreté dans le tunnel sous la Manche. (D'après le compte rendu du Conseil des ministres du 6 février 2019)
Voir aussi le rapport au président de la République sur l'ordonnance.Rubriques : capitaux, banques et assurances / commerce, industrie et transport / sécurité sociale et action sociale / travail et emploi
- Ordonnance n° 2019-78 du 6 février 2019 relative à la préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne en matière de transport routier de personnes et de marchandises et de sûreté dans le tunnel sous la Manche. En cas de sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne sans accord, cette ordonnance permettra, temporairement, et sous réserve de réciprocité, aux personnes établies au Royaume-Uni de réaliser des opérations de transport routier de marchandises ou de personnes sur le territoire national, pour compte d'autrui et pour leur propre compte. Sont concernées les opérations entre la France et le Royaume-Uni, le transit ainsi que la réalisation d'opérations de cabotage. Par ailleurs, le Gouvernement sera attentif au maintien d'une concurrence loyale, notamment en matière sociale. L'adhésion du Royaume-Uni à l'accord européen relatif au travail des équipages des véhicules effectuant des transports internationaux par route apporte à cet égard des garanties en matière de temps de repos et de temps de conduite similaires au droit européen.
Ces dispositions sur le transport routier de personnes et de marchandises ne seront applicables que dans l'hypothèse où l'Union européenne ne trouverait pas un accord à son niveau sur le projet de règlement européen en cours de négociation à Bruxelles et destiné à prendre des mesures d'urgence dans ces deux domaines. Le cas échéant, ces dispositions de l'ordonnance prendront effet à la date de retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne sans accord et demeureront applicables jusqu'au 31 décembre 2019 au plus tard, sauf à ce qu'un accord avec le Royaume-Uni soit conclu dans ce domaine. Si des négociations s'engageaient avec le Royaume-Uni sur ce point, ces mesures d'urgence pourraient être prolongées jusqu'au 31 décembre 2020 afin de les mener jusqu'à leur terme.
Un décret pourra suspendre ces mesures si le Gouvernement constate que les autorités britanniques n'adoptent pas des dispositions similaires sur leur territoire en faveur des personnes établies en France, ou s'ils n'adoptent pas des mesures équivalentes à celles, favorables aux ressortissants britanniques, prévues par l'ordonnance portant diverses mesures relatives à l'entrée, au séjour, aux droits sociaux et à l'activité professionnelle, applicables en cas d'absence d'accord sur le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.
Enfin, la continuité du trafic de passagers par le tunnel sous la Manche constituant un enjeu majeur pour la France et le continent européen, il est nécessaire de sécuriser le cadre juridique existant s'agissant des règles de sûreté qui s'imposent aux acteurs liés au fonctionnement du tunnel ainsi qu'aux passagers à destination ou en provenance du Royaume-Uni.
Dans le cadre du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, compte tenu des conséquences concrètes d'une sortie sans accord sur la fluidité du trafic et les risques en matière de sûreté, et en application de ses engagements internationaux, la France adapte donc son droit national pour que ces règles de sûreté soient opposables et permettent de renforcer efficacement la sûreté de la partie française du tunnel sous la Manche. Ces dispositions prendront effet à la date de retrait sans accord du Royaume-Uni de l'Union européenne. (D'après le compte rendu du Conseil des ministres du 6 février 2019)
Voir aussi le rapport au président de la République sur l'ordonnance.
Voir aussi :
Loi n° 2019-30 du 19 janvier 2019 habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne - Décret n° 2019-220 du 22 mars 2019 pris pour l'application dans le secteur du transport routier de l'ordonnance n° 2019-78 du 6 février 2019 relative à la préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne en matière de transport routier de personnes et de marchandises et de sûreté dans le tunnel sous la Manche - Décrets n° 2019-244, 2019-245 et 2019-246 du 27 mars 2019 relatifs au transport routier de marchandises et de passagers eu égard au retrait de la Grande-Bretagne de l'Union - (caducité de l'ordonnance n° 2019-76 du 6 février 2019) CE 1 juillet 2020 M. A et autres n° 428134, 429442