Loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 portant transposition de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales (Lien Legifrance, JO 28/05/2014, p. 8864)

Les principales dispositions
    La loi a pour objet principal de transposer en droit français la directive européenne du 22 mai 2012 relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales, transposition qui devait être effectuée avant le 2 juin 2014.

    Elle crée le statut de « suspect libre » qui s'applique aux auditions de personnes suspectées et ne faisant pas l'objet d'une garde à vue (art. 1er ajoutant l'article 61-1 dans le code de procédure pénale). L'audition d'un « suspect libre » ne peut débuter qu'après que la personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction a été informée : de la qualification, de la date et du lieu présumés de l'infraction qu'elle est soupçonnée d'avoir commise ou tenté de commettre ; du droit de quitter à tout moment les locaux où elle est entendue ; du droit de faire des déclarations, de répondre aux questions ou de se taire ; le cas échéant, du droit d'être assistée par un interprète ; de la possibilité de bénéficier, le cas échéant gratuitement, de conseils juridiques dans une structure d'accès au droit ; si l'infraction pour laquelle elle est entendue est un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement, du droit d'être assistée par un avocat ; de la possibilité de bénéficier, le cas échéant gratuitement, de conseils juridiques dans une structure d'accès au droit.

    Elle reconnaît le droit pour la victime d'être assistée par un avocat dans le cadre d'une confrontation avec un suspect entendu librement (art. 2 insérant l'article 61-2 dans le code de procédure pénale, entrée en vigueur le 1er janvier 2015).

    Elle supprime la possibilité de prolonger le délai de garde à vue de 48 à 96 heures en cas de délit d'escroquerie en bande organisée ainsi que de recel, de blanchiment ou d'association de malfaiteurs en vue de commettre ce délit (art. 4 complétant l'article 706-88 du CPP). Il en va cependant autrement en cas d'atteinte à la sécurité, à la dignité ou à la vie des personnes ou aux intérêts fondamentaux de la nation ou si l'un des faits constitutifs de l'infraction a été commis hors du territoire national.

    Elle prévoit la remise à toute personne suspectée ou poursuivie qui est privée de liberté d'un document écrit récapitulant l'ensemble de ses droits (art. 5 complétant le code de procédure pénale par un article 803-6). Ce document devra être rédigé en termes simples et accessibles, et dans une langue que la personne comprend. La personne est autorisée à conserver ce document pendant toute la durée de sa privation de liberté. Les droits récapitulés sont : 1° Le droit d'être informée de la qualification, de la date et du lieu de l'infraction qui lui est reprochée ; 2° Le droit, lors des auditions ou interrogatoires, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; 3° Le droit à l'assistance d'un avocat ; 4° Le droit à l'interprétation et à la traduction ; 5° Le droit d'accès aux pièces du dossier ; 6° Le droit qu'au moins un tiers ainsi que, le cas échéant, les autorités consulaires du pays dont elle est ressortissante soient informés de la mesure privative de liberté dont elle fait l'objet ; 7° Le droit d'être examinée par un médecin ; 8° Le nombre maximal d'heures ou de jours pendant lesquels elle peut être privée de liberté avant de comparaître devant une autorité judiciaire ; 9° Le droit de connaître les modalités de contestation de la légalité de l'arrestation, d'obtenir un réexamen de sa privation de liberté ou de demander sa mise en liberté.

    Les droits à l'information sur le droit à l'interprétation et à la traduction et le droit au silence et à l'accès au dossier au cours de l'instruction sont affirmés (art. 6 modifiant les art.114 et 116 du CPC).

    La sanction en cas de violation du secret de l'instruction par les parties est aggravée : le montant de l'amende encourue par une partie qui diffuserait à des tiers les pièces ou actes de la procédure d'instruction dont elle a reçu copie passe de 3 750 à 10 000 euros (art. 7 modifiant l'art. 114-1 du code de procédure pénale).

    En cas de poursuites par citation ou convocation, les avocats des parties peuvent consulter le dossier de la procédure au greffe du tribunal de grande instance dès la délivrance de la citation ou au plus tard deux mois après la notification de la convocation (art. 8 ajoutant les art. 388-4.et 388-5 CPC). A leur demande, les parties ou leur avocat peuvent se faire délivrer copie des pièces du dossier. Si le dossier a fait l'objet d'une numérisation, cette copie est remise sous forme numérisée, le cas échéant par un moyen de télécommunication. La délivrance de cette copie intervient dans le mois qui suit la demande. Toutefois, en cas de convocation en justice et si la demande est faite moins d'un mois après la notification de cette convocation, cette délivrance intervient au plus tard deux mois après cette notification. La délivrance de la première copie de chaque pièce du dossier est gratuite. En cas de poursuites par citation ou convocation, les parties ou leur avocat peuvent, avant toute défense au fond ou à tout moment au cours des débats, demander, par conclusions écrites, qu'il soit procédé à tout acte qu'ils estiment nécessaire à la manifestation de la vérité. Ces conclusions peuvent être adressées avant le début de l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par remise au greffe contre récépissé.

    Un décret devra intervenir pour préciser les modalités d'application du droit d'une personne poursuivie ou suspectée à un interprète ou à une traduction (art. 9 complétant l'article 803-5 du CPP). Il définit notamment les pièces essentielles devant faire l'objet d'une traduction.

    Le décret précisant le régime disciplinaire des personnes détenues et autorisant l'assistance d'un avocat doit aussi déterminer les conditions dans lesquelles le dossier de la procédure disciplinaire est mis à sa disposition et celles dans lesquelles l'avocat, ou l'intéressé s'il n'est pas assisté d'un avocat, peut prendre connaissance de tout élément utile à l'exercice des droits de la défense, sous réserve d'un risque d'atteinte à la sécurité publique ou à celle des personnes (art. 10 complétant le 4° de l'article 726 du code de procédure pénale).

    Les conditions dans lesquelles une personne suspectée peut être entendue librement au cours d'une enquête douanière sont précisées (article 12 insérant l'art. 67 F dans le CPP). La personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction et qui n'est pas placée en retenue douanière ne peut être entendue sur ces faits qu'après la notification des informations prévues à l'article 61-1 du code de procédure pénale.

    L'aide juridique est réformée afin d'instaurer un droit à rétribution de l'avocat assistant la personne suspectée au cours de son audition ou d'une confrontation en matière pénale ou douanière ou assistant la victime au cours d'une confrontation (article 13 complétant la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, entrée en vigueur le 1er janvier 2015).

    Les conditions de l'applicabilité de la loi à certaines collectivités situées outre-mer sont précisées (article 14) ;

    La loi entre en vigueur le 2 juin 2014 à l'exception outre des dispositions mentionnées ci-dessus de celles du 5° et de l'avant-dernier alinéa de l'article 61-1 du code de procédure pénale.

Plan de la loi
Chapitre Ier : Dispositions relatives à l'audition des personnes soupçonnées et ne faisant pas l'objet d'une garde à vue (art. 1er à 3)
Chapitre II : Dispositions relatives aux personnes faisant l'objet d'une privation de liberté (art. 4 et 5)
Section 1 : Dispositions relatives à la garde à vue (art. 4)
Section 2 : Dispositions relatives à la déclaration des droits devant être remise aux personnes privées de liberté (art. 5)
Chapitre III : Dispositions relatives aux personnes poursuivies devant les juridictions d'instruction ou de jugement (art. 6 à 10)
Section 1 : Dispositions relatives à l'information du droit à l'interprétation et à la traduction et du droit au silence et à l'accès au dossier au cours de l'instruction (art. 6 et 7)
Section 2 : Dispositions relatives à l'information du droit à l'interprétation et à la traduction et du droit au silence, à l'accès au dossier et à l'exercice des droits de la défense des personnes poursuivies devant les juridictions de jugement (art. 8 à 10)
Chapitre IV : Dispositions relatives à l'accès aux preuves des personnes détenues poursuivies en commission disciplinaire (art. 11)
Chapitre V : Dispositions diverses (art. 12 à 15)


Pas de saisine préalable du Conseil Constitutionnel

Rubrique :  pénal et pénitentiaire



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