Loi n° 2023-140 du 28 février 2023 créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales (Lien Legifrance, JO 01/03/2023)

    La loi, issue d'une proposition parlementaire, crée une aide financière d'urgence destinée aux victimes de violences conjugales, sous la forme d'un prêt ou d'une aide non remboursable, selon la situation financière et sociale de la personne, accordée par les caisses d'allocations familiales ou les caisses de la MSA. Cette aide peut être assortie des droits et des aides accessoires au revenu de solidarité active. Les auteurs des violences conjugales encourent pour leur part la peine complémentaire d'obligation de remboursement du prêt versé à la victime. La loi met aussi en place une loi de programmation pluriannuelle de lutte contre les violences faites aux femmes qui détermine la trajectoire des finances publiques en matière de prévention et d'accompagnement des femmes victimes de violence.

Présentation plus détaillée :
    L'article 1er insère dans le code de l'action sociale et des familles, un nouveau chapitre intitulé « Aide universelle d'urgence pour les personnes victimes de violences conjugales » (art. L. 214-8 à L. 214-14). Il indique que toute personne victime de violences conjugales, entendues au sens de l'article 132-80 du code pénal, peut bénéficier d'un accompagnement adapté à ses besoins. Elle bénéficie, à sa demande, d'une aide financière d'urgence sous réserve d'être victime de violences commises par son conjoint, son concubin ou le partenaire lié à elle par un pacte civil de solidarité et attestées par une ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales, par un dépôt de plainte ou par un signalement adressé au procureur de la République. L'aide financière prend la forme d'un prêt sans intérêt ou d'une aide non remboursable, selon la situation financière et sociale de la personne, en tenant compte, le cas échéant, de la présence d'enfants à charge. Son montant peut être modulé selon l'évaluation des besoins de la personne (situation financière et sociale, présence éventuelle d'enfants à charge), dans la limite de plafonds. Le versement de l'aide ou d'une partie de l'aide intervient dans un délai de trois jours ouvrés à compter de la réception de la demande. Par dérogation, ce délai peut être porté à cinq jours ouvrés si le demandeur n'est pas allocataire. Pendant six mois à compter du premier versement de l'aide, la victime recevant l'aide financière peut bénéficier des droits et des aides accessoires au revenu de solidarité active, comme la complémentaire santé solidaire (C2S) et l'accompagnement social et professionnel. Dans le cas où l'aide a été consentie sous la forme d'un prêt et lorsque les faits prévus au premier alinéa de l'article L. 214-9 ont donné lieu à une procédure pénale, son remboursement ne peut être demandé au bénéficiaire tant que cette procédure est en cours. Ce remboursement est demandé à l'auteur des violences lorsque celui-ci a été définitivement condamné à la peine prévue à l'article 222-44-1 du code pénal ou a fait l'objet de la mesure de composition pénale prévue au 20° de l'article 41-2 du code de procédure pénale ou de la mesure de classement sous condition de versement pécuniaire prévue au 4° de l'article 41-1 du même code. Cette demande est possible même si la créance correspondante n'est pas encore exigible auprès du bénéficiaire. Dans le cas où le remboursement du prêt incombe au bénéficiaire, des remises ou des réductions de créance peuvent lui être consenties en fonction de sa situation financière. Un décret doit déterminer les conditions d'application de cette aide universelle.

    L'article 2 habilite le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi visant à adapter au Département de Mayotte l'aide créée par la présente loi.

    L'article 3 prévoit, avant le 1er juillet 2023, puis tous les cinq ans, une loi de programmation pluriannuelle de lutte contre les violences faites aux femmes qui détermine la trajectoire des finances publiques en matière de prévention et d'accompagnement des femmes victimes de violence, pour trois périodes successives de cinq ans. Elle se fonde sur une évaluation des besoins des personnes victimes de violences au sein de leur couple ou de leur famille, menacées de mariage forcé ou contraintes de quitter leur logement après des menaces de violence ou des violences subies effectivement. Dans le cadre de leurs publications annuelles, l'Observatoire national des violences faites aux femmes et le Haut Conseil pour l'égalité entre les femmes et les hommes remettent un avis sur la cohérence entre les objectifs fixés et les moyens financiers de cette loi de programmation.

    L'article 4 complète le code pénal par un article 222-44-1 pour prévoir que les personnes physiques coupables des infractions prévues au 6° des articles 222-10, 222-12 et 222-13 ou à l'avant-dernier alinéa de l'article 222-14 encourent également la peine complémentaire d'obligation de remboursement du prêt versé à la victime en application de l'article L. 214-9 du code de l'action sociale et des familles, sans que ce remboursement puisse excéder 5 000 euros. Le prononcé de cette peine complémentaire est obligatoire en cas de condamnation pour l'un des crimes ou délits punis au 6° des articles 222-10 et 222-12 et à l'avant-dernier alinéa de l'article 222-14 du présent code. Toutefois, la juridiction peut, par une décision spéciale et motivée lorsque la condamnation est prononcée par une juridiction correctionnelle, décider de ne pas prononcer cette peine en considération des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. L'article 4 insère aussi dans le code de procédure pénale, un article 15-3-2-1, prévoyant qu'en cas de plainte déposée pour une infraction commise par le conjoint de la victime, par son concubin ou par le partenaire lié à elle par un pacte civil de solidarité, l'officier ou l'agent de police judiciaire qui reçoit la plainte ou, sous son contrôle, l'assistant d'enquête informe la victime qu'elle peut, le cas échéant, bénéficier d'une aide d'urgence au titre de l'article L. 214-9 du code de l'action sociale et des familles.

    L'article 5 prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport évaluant précisément le dispositif prévu à l'article 4 à travers une évaluation territorialisée du nombre de demandes d'aide d'urgence transmises par les services de police judiciaire, du nombre et de la nature des interventions des travailleurs sociaux mentionnés à l'article L. 121-1-1 du code de procédure pénale et de la recevabilité des demandes transmises dans ce cadre.

    L'article 6 prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport portant sur la possibilité pour les habitants des collectivités relevant de l'article 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie de bénéficier de tout ou partie des droits prévus par la présente loi, sans préjudice des compétences dévolues à ces collectivités.

    L'article 7 indique que la date d'entre en vigueur est fixée par décret, et au plus tard neuf mois après sa promulgation.

A noter :
Article 132-80 du code pénal
Version en vigueur depuis le 06 août 2018
Modifié par LOI n°2018-703 du 3 août 2018 - art. 13
Dans les cas respectivement prévus par la loi ou le règlement, les peines encourues pour un crime, un délit ou une contravention sont aggravées lorsque l'infraction est commise par le conjoint, le concubin ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, y compris lorsqu'ils ne cohabitent pas.
La circonstance aggravante prévue au premier alinéa est également constituée lorsque les faits sont commis par l'ancien conjoint, l'ancien concubin ou l'ancien partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité. Les dispositions du présent alinéa sont applicables dès lors que l'infraction est commise en raison des relations ayant existé entre l'auteur des faits et la victime.

Pas de saisine préalable du Conseil Constitutionnel

Rubriques :  sécurité sociale et action sociale / droits civils, famille, dons et legs / pénal et pénitentiaire

Voir aussi :
Loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales - Décret n° 2023-1088 du 24 novembre 2023 relatif à l'aide universelle d'urgence pour les personnes victimes de violences conjugales


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