Loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense (Lien Legifrance, JO 29/07/2015, p. 12873)

Les principales dispositions
    La loi intervient en vertu de l'article 6 de la loi du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale (LPM) prévoyant l'actualisation de la programmation militaire. Elle traduit ainsi les décisions prises, notamment en conseil de défense le 29 avril 2015. Elle détermine les objectifs de la politique de défense réactualisés sur la période 2015-2019. Elle consolide l'effort de défense de la France compte tenu de l'acuité des menaces qui pèsent contre la sécurité de la France et de ses intérêts, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur du territoire national.

Chapitre Ier : Dispositions portant actualisation de la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 (art. 1er à 7)
    Les modifications apportées au rapport annexé prévu à l'article 2 de la loi de 2013 sont approuvées (art. 1er).

    La nouvelle trajectoire financière de la loi de programmation militaire destinée « à conforter la ressource nécessaire aux armées et à prendre en compte le renforcement de leurs missions, pour répondre aux évolutions stratégiques et de sécurité intervenues depuis 2013 est déterminée (art. 2 ). Des crédits supplémentaires sont ainsi décidés.

    Les missions intérieures en cours font l'objet d'un bilan opérationnel et financier communiqué par le gouvernement aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat en même temps que le bilan (art. 3 ajoutant l'art. 4-1 dans la loi de 2013).

    Les réductions nettes d'effectifs du ministère de la défense s'élèvent non plus à 33 675 équivalents temps plein pour la période de programmation 2014-2019, mais à 6 918 équivalents temps plein (article 4 réécrivant l'article 5 de la loi de 2013). Au terme de cette évolution, en 2019, les effectifs du ministère de la défense s'élèveront ainsi à 261 161 agents en équivalents temps plein au lieu de 242 279 prévus initialement.

    Les articles 3 et 5 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 précitée, dans leur rédaction résultant de la présente loi, font l'objet d'un rapport d'évaluation remis par le gouvernement au parlement en 2017, au plus tard le 31 mars, en vue, le cas échéant, d'une nouvelle actualisation (art. 5).

    Le contenu du rapport annuel sur l'exécution de la loi de programmation est complété (art. 6).

    Le gouvernement remet, avant le 31 janvier 2016, un rapport au parlement sur les conditions d'emploi des forces armées lorsqu'elles interviennent sur le territoire national pour protéger la population (art. 7).

Chapitre II : Dispositions relatives au secret de la défense nationale (art. 8)
    Le président d'une des commissions permanentes de l'Assemblée nationale ou du Sénat chargées des affaires de sécurité intérieure, de la défense ou des finances peut désormais demander l'avis de la commission consultative du secret de la défense nationale sur la déclassification et la communication d'informations classifiées ou protégées au titre du secret de la défense nationale (art. 8 modifiant les art. L. 2312-1 et L. 2312-4 du code de la défense).

Chapitre III : Dispositions relatives aux associations professionnelles nationales de militaires (art. 9 à 13)
    La condition militaire est définie (art. 9 complétant l'art. L. 4111-1 du code de la défense) : "La condition militaire recouvre l'ensemble des obligations et des sujétions propres à l'état militaire, ainsi que les garanties et les compensations apportées par la Nation aux militaires. Elle inclut les aspects statutaires, économiques, sociaux et culturels susceptibles d'avoir une influence sur l'attractivité de la profession et des parcours professionnels, le moral et les conditions de vie des militaires et de leurs ayants droit, la situation et l'environnement professionnels des militaires, le soutien aux malades, aux blessés et aux familles, ainsi que les conditions de départ des armées et d'emploi après l'exercice du métier militaire.".

    La liberté des militaires de créer, d'adhérer et d'exercer des responsabilités dans une association professionnelle nationale de militaires est affirmée mais l'interdiction des groupements professionnels militaires à caractère syndical est rappelée (art. 10 modifiant l'article L. 4121-4 du code de la défense).

    La création d'associations professionnelles nationales de militaires (APNM) est autorisée et leur régime juridique est déterminé (art. 11 insérant dans le code de la défense un nouveau chapitre, art. L. 4126-1 à L. 4126-10). Cette évolution intervient en conséquence des décisions de la Cour européenne des droits de l'homme du 2 octobre 2014 Matelly et ADEFDROMIL. Les associations professionnelles nationales de militaires (APNM) sont régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association et dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin ou de la Moselle, par les dispositions du code civil local. Constituées exclusivement de militaires, elles ont pour objet de préserver et de promouvoir les intérêts des militaires en ce qui concerne la condition militaire. Elles représentent les militaires, sans distinction de grade, appartenant à l'ensemble des forces armées et des formations rattachées ou à au moins l'une des forces armées ou à une formation rattachée. Elles peuvent ester en justice contre tout acte réglementaire relatif à la condition militaire et contre les décisions individuelles portant atteinte aux intérêts collectifs de la profession. Elles ne peuvent contester la légalité des mesures d'organisation des forces armées et des formations rattachées. Elles peuvent exercer tous les droits reconnus à la partie civile concernant des faits dont elles sont personnellement et directement victimes. Aucune discrimination ne peut être faite entre les militaires en raison de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une association professionnelle nationale de militaires. Leurs membres jouissent des garanties indispensables à leur liberté d'expression pour les questions relevant de la condition militaire. Leur siège social doit être en France et l'obtention de la capacité juridique est subordonnée au dépôt de leurs statuts et de la liste de leurs administrateurs auprès du ministre de la défense. Leurs statuts et leur activité ne peuvent porter atteinte aux valeurs républicaines ou aux principes fondamentaux de l'état militaire ni aux obligations énoncées aux articles L. 4121-1 à L. 4121-5 et L. 4122-1. Leur activité doit s'exercer dans des conditions compatibles avec l'exécution des missions et du service des forces armées et ne pas interférer avec la préparation et la conduite des opérations. Les associations sont soumises à une stricte obligation d'indépendance, notamment à l'égard du commandement, des partis politiques, des groupements à caractère confessionnel, des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs, des entreprises, ainsi que des Etats. Elles ne peuvent constituer d'unions ou de fédérations qu'entre elles. Lorsque les statuts d'une association professionnelle nationale de militaires sont contraires à la loi ou en cas de refus caractérisé d'une telle association de se conformer aux obligations auxquelles elle est soumise, l'autorité administrative compétente peut, après une injonction demeurée infructueuse, demander à l'autorité judiciaire leur dissolution ou les autres mesures prévues à l'article 7 de la loi du 1er juillet 1901.

    Les associations professionnelles nationales de militaires peuvent être reconnues représentatives lorsqu'elles satisfont aux conditions suivantes (art. 11) : 1° Le respect des obligations valant pour pour toutes les APNM ; 2° La transparence financière ; 3° Une ancienneté minimale d'un an à compter du dépôt de leurs statuts ; 4° Une influence significative, mesurée en fonction de l'effectif des adhérents, des cotisations perçues et de la diversité des groupes de grades représentés. Les APNM ou leurs unions et fédérations reconnues représentatives d'au moins trois forces armées et de deux formations rattachées peuvent siéger au Conseil supérieur de la fonction militaire dans la limite du tiers du total des sièges (art. L. 4124-1 du code de la défense modifié), dans des conditions fixées par décret. Les associations professionnelles nationales de militaires représentatives ont qualité pour participer au dialogue organisé, au niveau national, par les ministres de la défense et de l'intérieur ainsi que par les autorités militaires, sur les questions générales intéressant la condition militaire. Elles sont appelées à s'exprimer, chaque année, devant le Haut Comité d'évaluation de la condition militaire. Elles peuvent, en outre, demander à être entendues par ce dernier sur toute question générale intéressant la condition militaire.

    Un décret d'application doit déterminer notamment : 1° Les modalités de la transparence financière ; 2° Les seuils à partir desquels les associations satisfont à la condition de représentativité ; 3° La fréquence d'actualisation de la liste des APNM par l'autorité administrative compétente; 4° Les facilités matérielles accordées aux associations afin de leur permettre d'exercer leurs activités ; 5° La nature des vérifications auxquelles le ministre de la défense procède pour vérifier la licéité des statuts que les associations professionnelles nationales de militaires déposent auprès de lui en vue d'obtenir la capacité juridique ainsi que les conditions et le délai dans lesquels le ministre de la défense procède à ces vérifications (art. L. 4126-10 du code de la défense). 

    Dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, le gouvernement présente au parlement un rapport sur la mise en œuvre de l'ensemble des dispositions relatives à la concertation et au dialogue social des militaires (art. 12). 

    Le crédit d'impôt accordé au titre des cotisations versées aux organisations syndicales est étendu aux associations nationales professionnelles de militaires (art. 13). 

Chapitre IV : Dispositions relatives aux ressources humaines (art. 14 à 21)
Section 1 : Gestion des personnels de la défense (art. 14 et 15)
    Le dispositif de la pension afférente au grade supérieur (PAGS), qui constitue l'une des mesures d'incitation au départ mises en place par la loi de programmation militaire 2014-2019, afin de faciliter les restructurations du ministère de la défense est clarifié (art. 14 modifiant l'art. 36 de la loi de 2013) . Cette mesure vient en complément du pécule modulable d'incitation au départ (PMID) et de la promotion fonctionnelle des militaires. Le dispositif de la PAGS permet aux militaires de quitter l'institution en bénéficiant d'une pension militaire de retraite revalorisée, notamment par la prise en compte, pour son calcul, de l'indice de rémunération du grade supérieur à celui détenu par le militaire lors de sa radiation des cadres. 

    Les conditions d'éligibilité pour bénéficier de la promotion fonctionnelle, qui constitue un autre levier d'incitation au départ prévu par la loi de programmation militaire 2014-2019 sont assouplies par leur ouverture aux militaires qui ont accompli quinze ans de services effectifs à la date de leur demande écrite de promotion (art. 15 modifiant l'art. 37 de la loi de 2013). 

Section 2 : Positions statutaires (art. 16 et 18)
    Le congé pour convenances personnelles pour élever un enfant de moins de huit ans est intégré dans la constitution du droit à pension à l'instar de ce qu'il en est pour les agents publics civils (article 16 modifiant l'alinéa 1er de l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite). Les congés de maladie des militaires sont aussi pris en compte dans la constitution du droit à pension.

    Le congé du blessé, prévu à l'article L. 4138-3-1 du code de la défense, est étendu aux militaires blessés ou ayant contracté une maladie en opérations de sécurité intérieure visant à la défense de la souveraineté de la France ou à la préservation de l'intégrité de son territoire et dont les conditions d'intensité et de dangerosité sont assimilables à celles d'une opération extérieure (OPEX) (art. 17 complétant l'article L. 4138-3-1du code de la défense).

    Les conditions d'emploi de réservistes en cas de crise menaçant la sécurité nationale sont assouplies afin de répondre aux besoins croissants de protection sur le territoire national face aux nouvelles menaces et de permettre une plus grande réactivité dans le recours aux réservistes tout en sécurisant leur situation à l'égard de leur employeur principal (art. 18 insérant l'art. L. 4221-4-1 dans le code de la défense). Ainsi, en cas de crise menaçant la sécurité nationale, le ministre de la défense, ou le ministre de l'intérieur pour les réservistes de la gendarmerie nationale, peut, par arrêté pris dans les conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat, notamment réduire la durée du prévis du réserviste à son employeur et augmenter le nombre de jours d'activités dans la réserve effectués sur le temps de travail et opposables à l'employeur.

Section 3 : Accès des militaires à la fonction publique (art. 19 à 21)
    La reconversion des militaires dans la fonction publique est facilitée, d'abord en ce qui concerne la mise en œuvre de la procédure d'accès à la fonction publique civile après un détachement (art. 19 modifiant notamment l'article L. 4139-2 du code de la défense). 

    L'accès des militaires aux concours internes des trois fonctions publiques est généralisé (art. 20 modifiant l'art. 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, l'article 36 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et l'article 29 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière).

    Le conjoint ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité (PACS), du militaire se trouvant dans l'incapacité permanente de travailler à la suite d'une blessure contractée en opération extérieure peut désormais bénéficier des emplois réservés (art. 21 modifiant l'art. L. 395 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre).

Chapitre V : Dispositions relatives à l'expérimentation d'un service militaire volontaire (art. 22 et 23)
    Le service militaire volontaire inspiré du service militaire adapté outre-mer est expérimenté en métropole pour deux ans à compter du 1er septembre 2015 (art. 22). Il vise à favoriser l'insertion professionnelle des jeunes français âgés de dix-sept ans révolus et de moins de vingt-six ans à la date de leur recrutement, qui ont leur résidence habituelle en métropole. Ils doivent être titulaires de leurs droits civiques, remplir les conditions d'aptitude physique et être en règle avec les obligations du code du service national (art. 23). Le contrat de volontaire stagiaire du service militaire volontaire est souscrit pour une durée minimale de six mois, renouvelable par période de deux à six mois, et pour une durée maximale de douze mois. Durant leur engagement, ils servent en qualité de volontaire stagiaire du service militaire volontaire, au premier grade de militaire du rang. Le service militaire volontaire comporte une formation militaire ainsi que diverses formations à caractère professionnel, civique ou scolaire visant à favoriser leur insertion sociale et professionnelle. Les volontaires stagiaires du service militaire volontaire sont encadrés par des personnels militaires qui assurent la mission de formateur, assistés de militaires volontaires dans les armées. Jusqu'au 31 décembre 2015, le nombre de volontaires stagiaires ne peut excéder trois cents. Au-delà de cette date, ce nombre peut être porté à un maximum de mille. Un rapport d'évaluation est remis au parlement par le gouvernement.

    Les volontaires stagiaires peuvent effectuer, dans le cadre légal des réquisitions ou des demandes de concours, des missions de sécurité civile. Ils peuvent également participer, dans le cadre de leur formation, à des chantiers d'application, à la demande de l'Etat, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et des associations à but non lucratif déclarées d'utilité publique. Ils bénéficient de la solde et des prestations en nature prévues réglementairement pour les volontaires stagiaires du service militaire adapté.

Chapitre VI : Dispositions diverses et finales (art. 24 à 34)
    Des modifications diverses sont apportées au code du service national. (art. 24 et 25).

    Les ministres de l'intérieur et de la défense et les ministres chargé des transports et des douanes peuvent demander aux opérateurs de voyage ou de séjour affrétant tout ou partie d'un aéronef de transmettre les données relatives aux passagers enregistrées dans leurs systèmes de réservation (art. 28 modifiant l'article L. 232-7 du code de la sécurité intérieure pour étendre sa portée). 

    Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances les dispositions relevant du domaine de la loi permettant (art. 30) : 1° De modifier certaines dispositions du code de l'environnement ; 2° De modifier le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; 3° De modifier le code de la défense ; 4° De définir les conditions dans lesquelles, sur décision administrative ou judiciaire, les commandants de bâtiments de l'Etat peuvent faire procéder à la destruction des cargaisons de produits stupéfiants saisis lors d'opérations de police en mer ; De supprimer certaines commissions relatives aux anciens combattants ; 6° De modifier les conditions dans lesquelles les conjoints et ex-conjoints survivants non remariés peuvent obtenir le bénéfice de l'allocation de reconnaissance.

    Les ordonnances n° 2014-792 du 10 juillet 2014 et n° 2014-1567 du 22 décembre 2014 portant application de l'article 55 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale sont ratifiées (art 31).

Plan de la loi
Chapitre Ier : Dispositions portant actualisation de la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 (art. 1er à 7)
Chapitre II : Dispositions relatives au secret de la défense nationale (art. 8)
Chapitre III : Dispositions relatives aux associations professionnelles nationales de militaires (art. 9 à 13)
Chapitre IV : Dispositions relatives aux ressources humaines (art. 14 à 21)
Section 1 : Gestion des personnels de la défense (art. 14 et 15)
Section 2 : Positions statutaires (art. 16 et 18)
Section 3 : Accès des militaires à la fonction publique (art. 19 à 21)
Chapitre V : Dispositions relatives à l'expérimentation d'un service militaire volontaire (art. 22 et 23)
Chapitre VI : Dispositions diverses et finales (art. 24 à 34)
Rapport annexé

Pas de saisine préalable du Conseil Constitutionnel

Rubriques :  défense, police, sécurité civile / fonction publique

Voir aussi :
Loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale - CourEDH 2 octobre 2014 Matelly c/ France n° 10609/10 - CourEDH 2 octobre 2014 Association de Défense des Droits des Militaires (ADEFDROMIL) c/ France n° 32191/09 - Décret n° 2016-1043 du 29 juillet 2016 relatif aux associations professionnelles nationales de militaires


affaires-publiques.org : accueil - informations/contacts