Ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat (ordonnance sur les partenariats publics/privés ou PPP) (Lien Legifrance, JO 19/06/2004, p. 10994)
Les principales dispositions
L'ordonnance (29 articles) est prise en application de l'art. 6 de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit qui l'autorise à prendre les dispositions nécessaires pour modifier la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée et à créer de nouvelles formes de contrats. Ces contrats conclus par des personnes publiques ou des personnes privées chargées d'une mission de service public ont pour objet la conception, la réalisation, la transformation, l'exploitation et le financement d'équipements publics, ou la gestion et le financement de services.
Elle crée une nouvelle catégorie de contrats administratifs - les contrats de partenariat - distincts à la fois des marchés publics et des délégations de service public (art. 1er). Ils sont définis comme des contrats par lesquels une personne publique "confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale relative au financement d'investissements immatériels, d'ouvrages ou d'équipements nécessaires au service public, à la construction ou transformation des ouvrages ou équipements, ainsi qu'à leur entretien, leur maintenance, leur exploitation ou leur gestion, et, le cas échéant, à d'autres prestations de services concourant à l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée".
Autrement dit, il s'agit d'une entente contractuelle entre des personnes publiques et privées afin d'améliorer une prestation de service public liée notamment à un équipement public. Le contrat de partenariat établit un partage des responsabilités et des risques et doit procurer des avantages mutuels. Ainsi pour la personne publique, il peut permettre de contourner un mauvais état des finances publiques en faisant supporter par des sociétés privées le préfinancement d'équipements, d'infrastructures ou de biens publics. Il pourrait apparaître des partenariats entre compagnies aériennes à bas coût et des aéroports locaux afin de favoriser leur développement, des partenariats pour assurer le développement de réseau haut débit dans de petites communes, etc.. Les contrats de mobilier urbain donnent d'ores et déjà une idée de ces futurs contrats de partenariat : contre une autorisation d'occupation du domaine public accordée à une entreprise pour y installer des équipements publicitaires, la collectivité territoriale délivre gratuitement de l'information municipale. Le procédé s'inscrit de manière peu contestable dans le mouvement de libéralisation de l'économie qui domine depuis le milieu des années 1980. L'ordonnance fixe un cadre général qu'il appartiendra aux règlements et à la jurisprudence de préciser.
Eléments fondamentaux :Par ailleurs :
- Les contrats de partenariat peuvent être conclus par l'Etat et les collectivités territoriales, et leurs établissements publics (Titres I et II), par des établissements publics de santé et des structures de coopération sanitaire dotées de la personnalité morale et par des groupements d'intérêt public (Titre III : art. 19 et suivants et art. 25). Le code général des collectivités territoriales et le code de la santé publique sont modifiés en conséquence. Des dispositions globalement similaires leur sont applicables.
- Le cocontractant de la personne publique assure la maîtrise d'ouvrage des travaux à réaliser et il peut aussi s'en voir confier la conception (art. 1er).
- La rémunération du partenaire privé fait l'objet d'un paiement par la personne publique pendant toute la durée du contrat. Elle peut être liée à des objectifs de performance qui lui sont assignés (art. 1er).
- Le recours à un contrat de partenariat ne peut se faire qu'au terme d'une évaluation préalable de chacune des possibilités juridiques ouvertes à l'administration pour la réalisation de son projet. L'évaluation doit mettre en évidence les avantages, notamment financiers, de recourir à ce type de contrat (art. 2). Elle répond à la réserve d'interprétation émise par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2003-473 (voir plus bas)
- La passation d'un contrat de partenariat est soumise aux principes de liberté d'accès, d'égalité de traitement des candidats et d'objectivité des procédures. Elle n'intervient qu'après la mise en œuvre de procédures de publicité et de mise en concurrence (art. 3).
- Certaines personnes ne peuvent conclure un contrat de partenariat (art. 4) : les condamnées pour certaines infractions, les faillis, etc.
- La personne publique peut recourir à une phase de dialogue en cas d'impossibilité objective pour elle de définir les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d'établir le montage financier ou juridique du projet (art. 5). Les modalités de ce dialogue sont précisées à l'art. 7. Par ailleurs, un décret doit définir les procédures d'appel d'offres.
- Le contrat est attribué au candidat qui a présenté l'offre économiquement la plus avantageuse. Parmi les critères d'attribution, figurent nécessairement le coût global de l'offre, des objectifs de performance définis en fonction de l'objet du contrat et la part d'exécution du contrat que le candidat s'engage à confier à des petites et moyennes entreprises et à des artisans (art. 8).
- La procédure après l'attribution du contrat comporte diverses obligations (art. 9) : information des candidats évincés ; publication au Journal officiel de l'union européenne, .... La signature par l'Etat d'un tel contrat ne peut intervenir qu'après l'accord du ministre chargé de l'économie ou de son représentant, qui apprécie ses conséquences sur les finances publiques et la disponibilité des crédits (art. 9).
- Le contrat de partenariat doit contenir des clauses obligatoires (durée, partage des risques entre la personne publique et la personne privée, rémunération du cocontractant, ...) (art. 11). Il peut prévoir la possibilité de recourir à l'arbitrage (art. 11 de la loi et art. L. 1414-12 du code général des collectivités territoriales).
Il est à noter que l'ordonnance tient compte de la décision n° 2003-473 DC du 26 juin 2003 par laquelle le Conseil constitutionnel a considéré, dans une réserve d'interprétation, que les ordonnances prises sur le fondement de l'article 6 de la loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit devront réserver les dérogations "à des situations répondant à des motifs d'intérêt général tels que l'urgence qui s'attache, en raison de circonstances particulières ou locales, à rattraper un retard préjudiciable, ou bien la nécessité de tenir compte des caractéristiques techniques, fonctionnelles ou économiques d'un équipement ou d'un service déterminé".
- Des dispositions particulières sont applicables aux contrats de partenariat qui confient au cocontractant tout ou partie de la conception des ouvrages (art. 12) et les contrats emportant occupation du domaine public, valent autorisation d'occupation de ce domaine pour leur durée (art. 13).
- Les contrats de partenariat sont soumis aux procédures de contrôle de droit commun, et en particulier au référé précontractuel et à la suspension sur déféré pour les contrats conclus par les collectivités territoriales (art.27) . Le code de justice administrative (art. L. 551-1 et L. 554-2) est modifié en conséquence. La suspension sur déféré est également étendue aux contrats de partenariat conclus par les établissements publics de santé (l'art. L. 6145-6 du code de la santé publique est modifié par l'art. 21 et l'art. L.554-5 du code de justice administrative devrait l'être aussi).
- Le code monétaire et financier est complété par un article L. 313-29-1 qui prévoit des dispositions particulières en cas de cession d'une créance détenue sur une personne publique par le titulaire d'un contrat de partenariat (art. 28).
L'ordonnance a été abrogée à compter du 1er avril 2016 par l'article 102 de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics.
Commentaires
GROUD Hervé, Réflexions sur les contrats de partenariat deux ans après, LPA, 2007,15 fév., pp. 4-13.
BEZANÇON X., DERUY L. FISZELSON R. et FORNACCIARI M., Les nouveaux contrats de partenariat public-privé, Ed. Le Moniteur, 2005.
LEROY A.-M., La complexité n'est pas soluble dans l'urgence (ou de l'opportunité d'amender l'ordonnance du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat), BJDCP 2006, juil., p. 171.
Les contrats de partenariat public-privé : premier bilan, BJDCP, 2006, n° 47, pp. 234-250, n° 48, pp. 333-336.
Partenariats public-privé, CDE, juil.-août 2006, pp. 15-51.
BRENET F. et MELLERAY F., Les contrats de partenariat de l'ordonnance du 17 juin 2004. Une nouvelle espèce de contrats administratifs, Litec, 2005.
EMERY Cyrille, Les trois principes de la passation des contrats de partenariat public-privé, AJDA, 2005, 5 déc., pp. 2269-2277.
LÉRAUT J., Réflexions sur les conditions d'urgence et de complexité justifiant le recours au contrat de partenariat, BJDCP, 2005, sept., p. 343.
NOYER B. et MELLERAY F., Contrat de partenariat et délit de favoritisme, AJDA, 2005, 2 mai, trib., p. 913.
TESSIER Alain, Les décrets d'application de l'ordonnance du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat : précisions et nouvelles interrogations, BJDCP, 2005, n° 38, p. 2.
TESSIER Alain, Le livre vert de la Commission européenne sur les partenariats public-privé et le droit communautaire des marchés publics et des concessions, BJDCP, 2004, n° 37, p. 419.
RICHER Laurent, Consolidation progressive du partenariat, AJDA, 2004, 8 nov., trib., p. 2073.
La réforme du partenariat public-privé (Dossier, 3 contrib.), AJDA, 2004, 27 sept., p. 1757
Partenariats publics/privés. Dialogue autour de l'ordonnance. Conf. du 5 nov. 2003 sous la resp. de Lucien RAPP (plusieurs contrib.), LPA, 2004, 18 mars.
Une nouvelle forme de contrat : le partenariat (7 contrib.), ACCP, 2004, sept., p. 24.
Les contrats de partenariats public/privé (dossier), BJDCP, 2004, p. 331.
Les partenariats public-privé revisités : implications pour la gouvernance future (plusieurs contrib.), RISA, 2004, p. 211.
DREYFUS Jean-David, Le contrat de partenariat public-privé ne doit pas être banalisé, AJDA, 2003, 28 juillet, trib., p. 1353.
GAUDEMET Yves, Libres propos sur le droit des contrats administratifs (La réforme de la commande publique et le partenariat public/privé), CJEG, 2004, p. 1.
Voir aussi :
Loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit - Loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée - CC 26 juin 2003 Loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit - CE 29 octobre 2004 M. Sueur et autres - Loi n° 2008-735 du 28 juillet 2008 relative aux contrats de partenariat