Loi n° 2015-1556 du 30 novembre 2015 relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales (Lien Legifrance, JO 01/12/2015, p. 22185)

Les principales dispositions
    Issue d'une proposition parlementaire, la loi de deux articles reprend et complète certaines des dispositions de la loi n° 2015 912 relative au renseignement du 24 juillet 2015, afin de remédier à la déclaration d'inconstitutionnalité de ses dispositions portant sur les communications électroniques internationales par le Conseil constitutionnel. Celui-ci avait estimé que le législateur n'avait pas épuisé sa compétence en ne déterminant pas les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques et en renvoyant l'édiction de certaines règles encadrant cette technique de renseignement au pouvoir réglementaire (décision n° 2015-713 DC du 23 juillet 2015, cons. 78 et 79).

    L'article 1er de la loi complète le code de la sécurité intérieure (CSI) par un chapitre IV consacré aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales (art. L 854-1 à L. 854-9). Il détermine les conditions de mise en œuvre de mesures de surveillance des communications électroniques internationales ainsi que les conditions d'exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés, sous le contrôle de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), et aussi la procédure juridictionnelle de contrôle de ces mesures de surveillance. Il crée ainsi un cadre juridique spécifique pour la surveillance des communications internationales, c'est-à-dire pour les communications dont au moins l'une des extrémités, émission ou réception, est située à l'étranger. Cette surveillance porte à la fois sur les données de connexion (numéros d'abonnement ou de connexion, horaires, durées,…) et les correspondances (contenus échangés). Les autorisations permettant ces surveillances sont délivrées par le Premier ministre ou un de ses délégués. À la différence des interceptions de sécurité, elles ne sont pas soumises à l'avis préalable de la CNCTR.

    L'article L. 854-1 du CSI ajouté par la loi autorise la surveillance des communications qui sont émises ou reçues à l'étranger et délimite le champ de celles de ces communications qui sont susceptibles de faire l'objet de mesures de surveillance internationale. Cet article indique que les mesures prises à ce titre ne peuvent avoir pour objet d'assurer la surveillance individuelle des communications de personnes utilisant des numéros d'abonnement ou des identifiants techniques rattachables au territoire national, à l'exception du cas où ces personnes communiquent depuis l'étranger et, soit faisaient l'objet d'une autorisation d'interception de sécurité de leurs correspondances délivrée en application de l'article L. 852-1, soit sont identifiées comme présentant une menace au regard des intérêts fondamentaux de la Nation. Hormis ces hypothèses, les communications électroniques qui sont échangées entre des personnes ou des équipements utilisant des numéros d'abonnement ou des identifiants techniques rattachables au territoire national, lorsqu'elles sont interceptées au moyen des mesures de surveillance prévues par le chapitre IV susmentionné, sont instantanément détruites.

    L'article L. 854-2 détermine la procédure d'autorisation de mise en œuvre des mesures de surveillance des communications électroniques internationales : les conditions dans lesquelles l'interception des communications émises ou reçues à l'étranger est autorisée ; les conditions dans lesquelles les données de connexion ainsi interceptées peuvent faire l'objet d'une exploitation non individualisée ; les conditions dans lesquelles les communications et les données de connexion ainsi interceptées peuvent être exploitées, y compris de manière individualisée.

    L'article L. 854-3 précise que les parlementaires, les magistrats, les avocats et les journalistes ne peuvent faire l'objet d'une surveillance individuelle de leurs communications à raison de l'exercice du mandat ou de la profession concerné.

    L'article L. 854-4 prévoit que l'interception et l'exploitation des communications font l'objet de dispositifs de traçabilité organisés par le Premier ministre après avis de la CNCTR.

    L'article L. 854-5 fixe les durées maximales de conservation des renseignements collectés par la mise en œuvre des mesures de surveillance des communications électroniques internationales, exception faite des correspondances interceptées qui renvoient à des numéros d'abonnement ou à des identifiants techniques rattachables au territoire national. Ces durées sont d'un an à compter de leur première exploitation, dans la limite de quatre ans à compter de leur recueil pour les correspondances interceptées, de six ans à compter de leur recueil pour les données de connexion et de huit ans à compter de leur recueil pour les renseignements chiffrés.

    L'article L. 854-6 détermine les conditions d'exploitation des renseignements collectés par le ou les services désignés par l'autorisation : les transcriptions ou les extractions et leurs destructions. Les renseignements ne peuvent être collectés, transcrits ou extraits pour d'autres finalités que celles mentionnées à l'article L. 811-3 (7 items). Les transcriptions ou les extractions doivent être détruites dès que leur conservation n'est plus indispensable à la poursuite des finalités mentionnées au même article L. 811-3. Les opérations de destruction des renseignements collectés, les transcriptions et les extractions sont effectuées par des agents individuellement désignés et habilités et font l'objet de relevés.

    L'article L. 854-7 prévoit que pour la mise en œuvre des mesures de surveillance des communications électroniques internationales sont applicables les conditions de réalisation des opérations matérielles nécessaires à la mise en place des techniques de recueil de renseignement dans les locaux et installations des services ou organismes placés sous l'autorité ou la tutelle du ministre chargé des communications électroniques ou des exploitants de réseaux ou fournisseurs de services de télécommunications : ordre du Premier ministre ou de la personne spécialement déléguée par lui ; réalisation par des agents qualifiés de ces services, organismes, exploitants ou fournisseurs dans leurs installations respectives ; prise en charge du surcoût.

    L'article L. 854-8 prévoit que lorsque les correspondances interceptées renvoient à des numéros d'abonnement ou à des identifiants techniques rattachables au territoire national, elles sont exploitées dans les conditions prévues aux IV et V de l'article L. 852-1 (centralisation par un service du Premier ministre de l'exécution des interceptions de sécurité et des opérations de transcription et d'extraction des communications interceptées) et conservées et détruites dans les conditions prévues aux articles L. 822-2 à L. 822-4, sous le contrôle de la CNCTR.

    L'article L. 854-9 est relatif, d'une part, aux pouvoirs dont dispose la CNCTR pour vérifier si les mesures de surveillance internationale sont régulièrement mises en œuvre et, d'autre part, à la procédure juridictionnelle de contrôle de ces mesures de surveillance, sachant que seule la CNCTR peut former un recours à l'encontre d'une mesure de surveillance internationale lorsque après avoir constaté un manquement elle adresse une recommandation au Premier ministre et que les suites données sont insuffisantes. Toute personne peut demander à la commission de vérifier qu'aucune mesure de surveillance n'est irrégulièrement mis en oeuvre à son égard et celle-ci notifie à l'auteur de la demande qu'il a été procédé aux vérifications nécessaires sans confirmer ni infirmer la mise en oeuvre de mesures de surveillance.

    L'article 2 de la loi est un article de coordination complétant l'article L. 773-1 du code de justice administrative par la référence au chapitre IV du CSI relatif aux "mesures de surveillance des communications électroniques internationales". Il intègre ainsi que dans ce cas le mode de saisine du Conseil d'État passe par le filtre de la CNCTR et cela écarte le risque d'engorgement de cette juridiction spécialisée.

Décision du Conseil Constitutionnel
CC 26 novembre 2015 Loi relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales n° 2015-722 DC

Rubriques :  défense, police, sécurité civile / médias, télécommunications, informatique

Voir aussi :
Loi n° 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement - CC 23 juillet 2015 Loi relative au renseignement n° 2015-713 DC


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