Loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures (Lien Legifrance, JO 17/02/2015, p. 2961)

Les principales dispositions
    Le gouvernement est habilité à simplifier, par ordonnance, certaines règles relatives à l'administration légale des biens d'un mineur et à la protection juridique des majeurs, afin notamment de créer un dispositif d'habilitation par justice au bénéfice de membres de la famille, du pacsé ou du concubin d'un majeur hors d'état de manifester sa volonté, leur permettant de le représenter ou de passer certains actes en son nom sans qu'il soit besoin de prononcer une mesure de protection judiciaire (art. 1er).

    Les animaux sont reconnus comme des êtres vivants doués de sensibilité (art. 2 insérant l'art. 515-14 dans le code civil). Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens. 

    Le gouvernement est habilité à modifier, par ordonnance, certaines règles relevant du droit de la famille et des successions (art. 3).

    Sous réserve de justifier de sa qualité d'héritier, tout successible en ligne directe peut : 1° Obtenir, sur présentation des factures, du bon de commande des obsèques ou des avis d'imposition, le débit sur les comptes de paiement du défunt, dans la limite des soldes créditeurs de ces comptes, des sommes nécessaires au paiement de tout ou partie des actes conservatoires, auprès des établissements de crédit teneurs desdits comptes, dans la limite d'un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie ; 2° Obtenir la clôture des comptes du défunt et le versement des sommes y figurant, dès lors que le montant total des sommes détenues par l'établissement est inférieur à un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie (art. 4 complétant l'article L. 312-1-4 du code monétaire et financier).

    Les actes liés à la rupture du contrat de travail du salarié du particulier employeur décédé, au paiement des salaires et indemnités dus au salarié ainsi qu'à la remise des documents de fin de contrat, sont ajoutés à la liste des actes réputés conservatoires qui peuvent être effectués sans emporter acceptation de la succession (art. 5 complétant l'article 784 du code civil).

    Le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut aussi demander l'attribution préférentielle du véhicule du défunt dès lors que ce véhicule lui est nécessaire pour les besoins de la vie courante (art. 6 modifiant l'art. 831-2 du code civil).

    Le gouvernement est habilité à modifier, par ordonnance, la structure et le contenu du livre III du code civil « afin de moderniser, de simplifier, d'améliorer la lisibilité, de renforcer l'accessibilité du droit commun des contrats, du régime des obligations et du droit de la preuve, de garantir la sécurité juridique et l'efficacité de la norme » (art. 8). Treize items sont listés.

    Les actions possessoires, qui ont essentiellement pour objet d'assurer en justice la protection d'une situation de fait sans qu'il soit nécessaire de rapporter la preuve de la propriété, sont supprimées (art. 9 abrogeant l'article 2279 du code civil). 

    L'ordonnance n° 2011-1895 du 19 décembre 2011 relative à la partie législative du code des procédures civiles d'exécution est ratifiée (art. 11).

    La référence à la procédure de « folle enchère » est supprimée et remplacée par les termes de « réitération des enchères » (art. 12 modifiant notamment l'art. L. 143-9 du code de commerce).

    La composition du Tribunal des conflits est modifiée et il est mis fin à la présidence du Tribunal des conflits par le garde des sceaux, ministre de la justice (art. 13 modifiant la loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d'Etat qui change d'intitulé et devient la loi du 24 mai 1872 relative au Tribunal des conflits). La présidence est assurée alternativement par un membre du Conseil d'État et par un membre de la Cour de cassation, élu par les membres titulaires du Tribunal, parmi eux, pour trois ans. Les règles de fonctionnement de la juridiction et de délibération sont modifiées et les cas de saisine de cette juridiction incorporés à la loi précitée. La dénomination "commissaire du gouvernement" est remplacée par celle de "rapporteur public" déjà applicable au sein des juridictions administratives. Il est précisé que : les débats ont lieu en audience publique après une instruction contradictoire ; le délibéré des juges est secret ; les décisions sont rendues au nom du peuple français. Elles sont motivées et comportent le nom des membres qui en ont délibéré. Elles sont rendues en audience publique. Une procédure simplifiée est mise en place lorsque la solution de la question soumise au Tribunal des conflits s'impose avec évidence : le président, conjointement avec le membre le plus ancien appartenant à l'autre ordre de juridiction, peut statuer par voie d'ordonnance dans les cas prévus par décret en Conseil d'État. Les décisions du Tribunal des conflits s'imposent à toutes les juridictions de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif. Les cas de saisine sont désormais prévus par les articles. 12 et 15 de la loi du 24 mai 1872 : conflit positif, conflit négatif, renvoi d'une juridiction, contrariété conduisant à un déni de justice. Le Tribunal des conflits est seul compétent pour connaître d'une action en indemnisation du préjudice découlant d'une durée totale excessive des procédures afférentes à un même litige et conduites entre les mêmes parties devant les juridictions des deux ordres en raison des règles de compétence applicables et, le cas échéant, devant lui. En conséquence, les textes historiques relatifs au Tribunal des conflits sont abrogés et notamment : l'ordonnance du 1er juin 1828 relative aux conflits d'attribution entre les tribunaux et l'autorité administrative ; la loi du 4 février 1850 portant sur l'organisation du Tribunal des conflits ; la loi du 20 avril 1932 ouvrant un recours devant le Tribunal des conflits contre les décisions définitives rendues par les tribunaux judiciaires et les tribunaux administratifs lorsqu'elles présentent contrariété aboutissant à un déni de justice. Les dispositions relatives au Tribunal des conflits entrent en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d'État, et au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi. 

    L'autorité judiciaire peut avec l'accord express de la personne concernée lui adresser par voie électronique les avis, convocations ou documents lorsque les dispositions prévoient que ces actes sont adressés par tout moyen, par lettre simple, par lettre recommandée ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (art. 14 complétant l'art.  803-1 du code de procédure pénale). Cela n'est pas applicable lorsque le code de procédure pénale impose une signification par voie d'huissier.

    Des dispositions diverses (art.15) modifient plusieurs codes. Ainsi, le régime de la surveillance des opérations funéraires est modifié (art. 15 modifiant l'art. L. 2213-14 du CGCT). Les manifestations sportives ne comportant pas la participation de véhicules à moteur et se déroulant à l'intérieur du territoire d'une seule commune font l'objet d'une déclaration auprès du maire de la commune concernée (art. 15 ajoutant article L. 331-8-1 dans le code des sports).

    Le gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi pour modifier :
    La personne en cours de formation pour la préparation d'un titre ou diplôme d'enseignant de la conduite et de la sécurité routière peut dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'État être autorisée à enseigner, à titre onéreux, la conduite des véhicules à moteur (art. 16 modifiant l'article L. 212-2 du code de la route). La proportion de personne en cours de formation ne peut dépasser un pourcentage maximum.

    Des aménagements sont apportés à la responsabilité du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) dans l'exercice de sa mission de tenue des registres du cinéma et de l'audiovisuel (art. 18 modifiant notamment l'article L. 125-1 du code du cinéma et de l'image animée). Le registre public du cinéma et de l'audiovisuel, placé auprès du CNC, assure, comme une conservation des hypothèques, la publicité des actes, conventions et jugements relatifs à la production, à la distribution, à la représentation et à l'exploitation des œuvres audiovisuelles immatriculées. Cette publicité peut prendre la forme d'une inscription ou d'une publication. Le registre des options a été créé pour assurer la publicité des projets et des contrats auxquels il donne lieu lorsque le producteur ayant pris une simple option pour l'adaptation d'une œuvre littéraire préexistante ne peut pas immatriculer au RPCA son projet ni rendre public les contrats afférents.

    Le gouvernement est habilité à prendre, par ordonnance, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour fusionner la commission nationale d'inscription et de discipline des administrateurs judiciaires et la commission nationale d'inscription et de discipline des mandataires judiciaires (art. 20).

    Le gouvernement est habilité à prendre, par ordonnance, les mesure nécessaires pour fusionner la commission compétente pour l'attribution de la qualité d'officier de police judiciaire aux militaires de la gendarmerie nationale et la commission compétente pour l'attribution de la qualité d'officier de police judiciaire aux fonctionnaires du corps d'encadrement et d'application de la police nationale (art. 21). Ce regroupement s'inscrit dans un contexte de rapprochement d'un certain nombre de fonctions supports des deux directions générales de la police et de la gendarmerie nationales. La commission nationale de conciliation instituée par la loi 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et la commission nationale de conciliation instituée par l'article 5 de la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers sont supprimées.

    En Polynésie française le tribunal foncier (dénomination du tribunal de première instance statuant en matière foncière) est substitué à la commission de conciliation obligatoire en matière foncière (art. 23 et 24 complétant notamment le code de l'organisation judiciaire)

    Les conditions d'application de l'ordonnance en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Polynésie française sont précisées (art. 25).

    Les ordonnances prévues par la présente loi doivent être prises dans un délai allant de six mois à douze mois (art. 27).

Plan de la loi
Titre Ier Dispositions relatives au droit civil (art. 1er à 10)
Titre II Dispositions relatives aux procédures civiles d'exécution (art.11 et 12)
Titre III Dispositions relatives au tribunal des conflits (art. 13)
Titre IV Dispositions relatives à la procédure pénale (art. 14)
Titre V Dispositions relatives à l'administration territoriale (art. 15 à 17)
Titre VI Dispositions relatives au code du cinéma et de l'image animée (art. 18)
Titre VII Dispositions relatives aux procédures administratives (art. 19 à 22)
Titre VIII Dispositions applicables en Polynésie française (art. 23 et 24)
Titre IX Dispositions finales (art. 25 à 27)

Décision du Conseil Constitutionnel
CC 12 février 2015 Loi relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures n° 2015-710 DC

Rubriques :  droit, justice et professions juridiques / contentieux

Commentaires
ARRIGHI DE CASANOVA J. et STAHL J.-H., Tribunal des conflits : l'âgde la maturité, AJDA, 2015, 23 mars, pp. 575-582.

Voir aussi :
Loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d'Etat - Décret n° 2015-233 du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles


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