Loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (loi ENL) (JO 16/07/2006, p. 10662)

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Les principales dispositions
    La loi (112 articles) comporte de nombreuses dispositions techniques et de détail portant principalement sur le logement. Elle contient également des dispositions d'incitation fiscale. Elle modifie et complète particulièrement les parties législatives du code de l'urbanisme et du code de la construction et de l'habitation.

    La réalisation de logements sur les terrains appartenant à l’Etat ou ses établissements publics est reconnue comme présentant un caractère d’intérêt national lorsqu’elle contribue notamment à l’atteinte des objectifs du volet « logement » du Plan de cohésion sociale. En cas de difficultés, des décrets peuvent, jusqu'au 1er janvier 2010, délimiter des périmètres dans lesquels les opérations de réalisation de logements ont les effets d'opérations d'intérêt national (OIN) au sens de l'article L. 121-2 du code de l'urbanisme (art. 1er). Le préfet devient alors compétent pour délivrer les autorisations d'urbanisme.

    Les places d’aire d’accueil des gens du voyage et des structures d'hébergement temporaire ou d'urgence bénéficiant d'une aide de l'Etat notamment sont comptabilisées comme logements sociaux (art. 1er IV complétant l'article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques).

    Un programme local de l'habitat est élaboré dans toutes les communautés de communes compétentes en matière d'habitat de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, les communautés d'agglomération et les communautés urbaines (art. 3, art. L. 302-1 du code de la construction et de l'habitation).

    Les communes sont autorisées à majorer le coefficient d'occupation des sols (jusqu'à 50 %) dans les secteurs à l'intérieur desquels sont réalisés des programmes de logements comportant au moins une moitié de logements locatifs sociaux (art. 4 IX).

    L'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme est ratifiée et plusieurs modifications sont apportées au code de l'urbanisme. En particulier, le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire (art. 6 complétant l'art. L. 424-5 du code de l'urbanisme, entrée en vigueur à compter du 1er juillet 2007).

    Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou de déclaration de travaux ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme (art. 9 insérant un article L. 111-12 dans le code de l'urbanisme). Toutefois, ces dispositions prescriptives ne sont pas applicables dans plusieurs hypothèses (absence de permis de construire, risques et dangers, domanialité publique, etc.).

    Lorsque la juridiction administrative constate que seule une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale, elle peut prononcer une annulation partielle de cette autorisation (art. 11 insérant un art. L. 600-5.dans le code de l'urbanisme).

    Lorsque la juridiction administrative, saisie d'un déféré préfectoral, a annulé par une décision devenue définitive un permis de construire pour un motif non susceptible de régularisation, le représentant de l'Etat dans le département peut engager une action civile en vue de la démolition de la construction dans les conditions et délais définis par le deuxième alinéa de l'article L. 480-13 (art. 12 insérant un art. L. 600-6.dans le code de l'urbanisme).

    Une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu antérieurement à l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire (art. 14 insérant un art. L. 600-1-1 dans le code de l'urbanisme).

    Un nouveau titre est intégré dans le code de l'urbanisme (art. L. 240-1 et s.) portant sur les dispositions relatives au droit de priorité au profit des communes quant à la mise en vente des biens immobiliers de l’Etat institué par l'article 30 de la loi n° 91-662 du 13 juillet 1991 modifiée d'orientation pour la ville (art. 15). La procédure d'acquisition de ces biens est simplifiée par le regroupement avec le droit de préemption, sauf dans diverses hypothèses.

    Le processus de création des établissements publics fonciers est précisé : accord tacite du préfet à défaut d'une décision dans un délai de trois mois (art. 16 complétant l'article L. 324-2 du code de l'urbanisme).

    La mission des établissements publics locaux de rénovation urbaine, établissements publics locaux à caractère industriel et commercial, est plus précisément définie (art. 17 modifiant article L. 326-1 du code de l'urbanisme).

    Les collectivités territoriales et leurs groupements sont autorisés à créer, à titre expérimental, pour une durée de cinq ans, des sociétés publiques locales d'aménagement dont ils détiennent la totalité du capital. Ce sont des sociétés anonymes compétentes pour réaliser, pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales ou des groupements de collectivités territoriales qui en sont membres, toute opération d'aménagement (art. 20 insérant un L. 327-1.dans le code de l'urbanisme).

    L'article L. 135 B du livre des procédures fiscales est modifié de façon à permettre aux propriétaires faisant l'objet d'une procédure d'expropriation d'accéder aux éléments d'information que l'administration fiscale détient au sujet des valeurs foncières déclarées à l'occasion des mutations intervenues dans les cinq dernières années (art. 21). Cette administration ne peut alors se prévaloir de la règle du secret. Une cause de condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme (voir affaire Yvon c/ France) disparaît ainsi.

    Des modifications sont apportées à l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (ANAH) (art. 37 modifiant l'article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation)

    Sont ratifiées les ordonnances n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme (art. 6) et n° 2005-1566 du 15 décembre 2005 relative à la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux (art. 44). Des modifications sont apportées aux dispositions codifiées par ces ordonnances.

    Le gouvernement est autorisé, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour améliorer les conditions dans lesquelles la collectivité publique garantit et recouvre, notamment par le bénéfice d'une sûreté réelle, le montant de la créance dont elle est titulaire à l'encontre du propriétaire d'un immeuble à usage total ou partiel d'habitation ou de la personne y exploitant un fonds de commerce utilisé aux mêmes fins, lorsqu'elle a exécuté d'office des travaux sur ce bien ou assuré l'hébergement ou le relogement des occupants, incombant au propriétaire de l'immeuble en cause ou à la personne y exploitant un fonds de commerce utilisé aux fins d'habitation (art. 44).

    Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toutes mesures pour substituer aux offices publics d'habitations à loyer modéré et aux offices publics d'aménagement et de construction une nouvelle catégorie d'établissements publics d'habitations à loyer modéré dénommés « offices publics de l'habitat » et rattachés à une collectivité territoriale ou à un groupement de collectivités territoriales (art. 49).

    Un plan départemental de l'habitat est élaboré dans chaque département afin d'assurer la cohérence entre les politiques d'habitat menées dans les territoires couverts par un programme local de l'habitat et celles menées dans le reste du département (art. 68 insérant une nouvelle section dans le code de la construction et de l'habitation).

    Le supplément de loyer de solidarité est réformé avec l'objectif de lui donner un effet plus dissuasif, la finalité étant de libérer les logements des bailleurs sociaux dont les locataires ont des ressources sensiblement supérieures aux plafonds de ressources et qui pourraient supporter les loyers du marché ou accéder à la propriété d’un logement (art. 71 modifiant divers articles du code de la construction et de l'habitation).

    Le préfet est autorisé à réquisitionner des locaux vacants ou insuffisamment occupés pour un an renouvelable (art. 72 modifiant l'article L. 641-1 du code de la construction et de l'habitation).

    Le dispositif de protection contre les coupures d'eau, de chaleur, d'électricité et de gaz pendant la période hivernale en cas de non-paiement des factures est renforcé (art. 75 complétant l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles)

    Le code de la construction et de l'habitation est complété par des dispositions relatives à la prévention des risques naturels et à la sécurité des installations intérieures d'électricité (art. 79 IV)

    Les conditions de rénovation des immeubles sont précisées dans une nouvelle sous-section ajoutée après l'article L. 111-6-2 du code de la construction et de l'habitation (art. 80).

    La liste des clauses réputées non écrites des contrats de bail est complétée (art. 84 complétant l'article 4 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986).

    La loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d'habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement est modifiée (art. 85).

    Diverses modifications sont apportées à la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs (art. 86 à 88).

    Des modifications visent les subventions pouvant être accordées pour les aires de grand passage destinées à répondre aux besoins de déplacement des gens du voyage en grands groupes à l'occasion des rassemblements traditionnels ou occasionnels (art. 89 modifiant l'article 4 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage).

    Un règlement de copropriété peut étendre l'objet d'un syndicat de copropriétaires à la fourniture, aux occupants de l'immeuble, de services spécifiques, notamment de restauration, de surveillance, d'aide ou de loisirs (art. 95 de la loi complétant la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis par des dispositions portant sur les résidences-services). Ces services peuvent être procurés en exécution d'une convention conclue avec des tiers. En revanche, le règlement ne peut porter sur des services de soins ou d'aide et d'accompagnement exclusivement liés à la personne.

    De manière provisoire (jusqu'au 1er janvier 2007) et dérogatoire, le représentant de l'Etat dans le département peut autoriser une commune à se retirer de la communauté de communes ou de la communauté d'agglomération dont elle est membre et autoriser son adhésion à un autre établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre compétent en matière de programme local de l'habitat alors que la commune demandant son adhésion et les communes de cet établissement public sont incluses dans le périmètre d'un même schéma de cohérence territoriale dont la majorité de la population appartient à cet établissement public (art. 107).

..… …..

(A noter : Le quota de 20 % de logements sociaux imposé aux communes de plus de 1500 habitants en Ile-de-France et de 3500 habitants ailleurs, comprises dans une agglomération (plus de 700 communes), par l'art. 55 de la loi " relative à la solidarité et au renouvellement urbains " (SRU) du 13 décembre 2000 (codifié à l'art. L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation) a été maintenu malgré l'opposition d'une partie des députés de l'UMP, le parti majoritaire. Toutefois, l'article L. 302-5 a subi quelques aménagements.


    Plan de la loi :
TITRE Ier MOBILISATION DE LA RESSOURCE FONCIÈRE POUR LA RÉALISATION DE LOGEMENTS
 Chap. Ier Faciliter la réalisation de logements sur les terrains publics (art. 1 et 2)
 Chap. II Faciliter l'adaptation des documents d'urbanisme aux objectifs fixés en matière de logement (art. 3 à 5)
 Chap. III Sécuriser les autorisations d'urbanisme et les constructions existantes (art. 6 à 14)
 Chap. IV Améliorer les outils d'acquisition foncière (art. 15 à 20)
 Chap. V Accroître la transparence du marché foncier (art. 21)
 Chap. VI Soutenir la construction de logements dans les communes (art. 22 à 27)
TITRE II DÉVELOPPEMENT DE L'OFFRE DE LOGEMENTS ET ACCÈS AU LOGEMENT
 Chap. Ier Favoriser l'accession à la propriété (art. 28 à 36)
 Chap. II Développer l'offre locative privée à loyers modérés (art. 37 à 42)
 Chap. III Lutter contre l'insalubrité et la vacance des logements (art. 43 à 48)
 Chap. IV Dispositions relatives aux bailleurs sociaux (art. 49 à 59)
 Chap. V Renforcer la mixité de l'habitat (art. 60 à 78)
TITRE III DISPOSITIONS DIVERSES RELATIVES AU LOGEMENT ET À LA COHÉSION SOCIALE
 Chap. Ier Dispositions relatives à la construction (art. 79 à 83)
 Chap. II Dispositions relatives aux rapports entre les bailleurs et les locataires (art. 84 à 88)
 Chap. III Autres dispositions (art. 89 à 112)

Pas de saisine du Conseil Constitutionnel

Rubriques :  urbanisme, logement, travaux publics, voirie / sécurité sociale et action sociale

Commentaires
FABRE-GARRUS Laure, La protection des locataires par le mécanisme du droit de préemption en cas de vente d'un immeuble, LPA, 2006, 4 oct., pp. 4-7.
JACQUOT Henri, La loi ENL échappe à la règle de "l'entonnoir", AJDA, 2006, 4 sept., trib., p. 1520.
JEGOUZO Yves, Une loi pour le logement in Dossier "La loi Engagement national pour le logement", AJDA, 2006, 4 sept., pp. 1534-1539.
DEVES Claude, La société publique locale d'aménagement : impasse juridique ou ballon d'essai ?, JCP A 2006, n° 1219.
LEBRETON Jean-Pierre, La mobilisation du droit de l'urbanisme pour le logement in Dossier "La loi Engagement national pour le logement", AJDA, 2006, 4 sept., pp. 1540-1548.
PÉRIGNON Sylvain, La sécurisation des autorisations d'urbanisme et des constructions existantes in Dossier "La loi Engagement national pour le logement", AJDA, 2006, 4 sept., pp. 1549-1553.
BROUANT Jean-Philippe, La loi ENL et la lutte contre l'habitat indigne in Dossier "La loi Engagement national pour le logement", AJDA, 2006, 4 sept., pp. 1554-1558.
HERRNBERGER O., Le sort des constructions illégales après la loi ENL, JCP N, 11 mai 2007, ét. 1172.
DUTRIEUX Damien, Le droit de propriété des communes rénové en cas de vente de biens du domaine privé de l'Etat, JCP A, 2006, 1181.


Voir aussi :
Loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale - Loi n° 2003-590 du 2 juillet 2003 urbanisme et habitat - Ordonnance n° 2006-1048 du 25 août 2006 relative aux sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété - Ordonnance n° 2007-137 du 1er février 2007 relative aux offices publics de l'habitat

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